Les premiers seront les derniers
La course à pied est une école d'humilité. Tu peux arriver sur la ligne de départ avec ton T-shirt de finisher de l'intergalactique trail de la mort qui tue, tes chaussures en turbo tungstène qui accélèrent pour toi dans les virages et les montées et ton caleçon de compression qui améliore ton coefficient de pénétration dans l'air, si tu n'as pas les jambes le jour J à l'heure H et la minute M (ainsi que les 250 minutes qui suivent), tu n'as pas les jambes ...
Pourtant, le week end avait bien commencé pour ce premier marathon de Carcassonne avec, avant le départ de la course, distribution de la médaille de débutant pour les marathoniens (par opposition à la médaille de finisher qui, traditionnellement, ne se distribue qu'à l'arrivée).
La médaille du débutant
Pour les participants au marathon en relais (chacun court environ 10 km avant que tous ne se rejoignent pour courir le dernier kilomètre ensemble), distribution de T-Shirt personnalisés par équipe.
Désolé pour le franglais, mais Roch a un passeport américain ...
L'organisation du marathon de Carcassonne nous a fait l'honneur de nous attribuer le dossard élite (?) numéro 1, ce qui nous permet d'affirmer que nous avons été -jusqu'au départ de la course- le premier des relais ; nous en avons donc profité pour prendre la pose -nous prendrons la pause pendant la course- avant que le classement ne démente notre statut.
Chacun constatera combien nous sommes affûtés (même si la côte de boeuf et les os à moelle de midi ainsi que les rayures ne rendent pas justice à nos profils d'athlète) à la veille de l'épreuve ; aucun détail n'a été laissé au hasard, même Gilette et Wilkinson ont été tenus à l'écart afin de nous permettre de conserver l'influx nerveux.
De dr à g. : Arthur, Grégoire, Whisky & the Rock
Le bonnet de bain, c'est pour le jour où nous nous mettrons au triathlon
Après avoir pris la précaution de sérieusement nous hydrater les deux nuits qui ont précédé le départ (blanc, rosé, rouge, Jet 27, Manzanita) nous nous sommes presque tous levés en temps et heure pour le départ (Averell nous rejoindra plus tard) d'une journée qui s'annonçait chaude.
Vérification du bracelet électronique par le staff technique
Nous avions convenu que je participerais à la fois au relais marathon (il fallait être quatre par équipe) et au marathon en individuel, ce qui signifie que je serais accompagné d'un autre des Dalton Brothers pendant les trois quarts de la course (puisque j'assumerai seul un des relais de 10 km) ... en théorie.
Première difficulté, les marathoniens et les relayeurs ne partent pas à la même heure ; il m'a fallu donc rivaliser de lenteur avec le dernier du peloton de marathoniens (déguisé en rugbyman et courant avec son ballon) le temps qu'Arthur, porteur du premier relais (le seul qui se court à la fraîche et qui fasse moins de 10 km), me rejoigne après avoir rivalisé de vitesse avec le premier des relayeurs (enfin, paraît il).
Deuxième difficulté, dont nous avions été prévenus la veille par voie de presse : "l'organisateur du marathon promet que l'an prochain le parcours sera moins vallonné et pentu". Certes, mais en attendant, j'aurais su, j'aurais fait un trail dans les Alpes pour m'entraîner ; Donald qui n'a pas couru de l'année mais est allé au ski m'a semblé plus à l'aise que moi.
Troisième difficulté, à partir du 30ème km il s'est mis à faire plus de 30 degrés sans beaucoup d'ombre ; résultat non seulement on a chaud, très chaud, mais en plus l'eau et le coca au ravitaillement sont chauds, très chauds ...
Quatrième difficulté, je ne sais plus trop. Mais quand tu as l'impression que le chemin de halage qui court (lui) le long du canal monte, tu sais que tu es en difficulté car des canaux en pente, il n'y en a qu'en Belgique, pour la pratique du ski nautique. Deux épisodes de crampes m'auront immobilisé chacun cinq minutes et m'auront privé de la compagnie de Roch que je n'aurai vu qu'au passage de relais au 31ème km et au moment d'attaquer le dernier km commun au 41ème km.
Pour ce dernier kilomètre, nous avions, la veille au soir, choisi la devise qui prévaudrait pour notre final. Liberté, Egalité ou Fraternité ?
Ceci n'est pas le slogan des Républicains
Autant dire que le premier thème à avoir été éliminé est celui de l'égalité ; quel intérêt de se fatiguer à courir si ce n'est pour ne pas se tirer la bourre ? Hors de question donc de finir sous la banderole "Arrivée" main dans la main comme toutes les autres équipes.
Il a été plus difficile de trancher entre fraternité - après tout, nous étions la seule fratrie complète à participer au marathon de Carcassonne et avions choisi le modèle des Dalton pour tenter un hold-up sur une place au podium (nous espérions que le nombre de relais soit limité à trois) - et liberté de courir comme nous l'entendions.
Nous avons réalisé la synthèse en pariant sur la fraternité qui nous caractérise : nous nous sommes octroyés la liberté de courir le plus vite possible pour, chacun, tenter de devancer tous nos autres frères sur la ligne d'arrivée. Enjeu : un restaurant à la charge du dernier.
Aucune raison de couper notre effort dans le dernier km donc ...
Et alors ? Et alors ? Et alors, ni Zorro ni la cavalerie ne sont arrivés pour sauver la situation.
Le relais Chevignard Brothers, dossard 1, finira dernier de la catégorie relais masculins.
Je finirai dernier, sur la ligne d'arrivée, de la lignée Chevignard.
Bref, nous avons un peu la tête à l'envers à l'arrivée.
Encore un coup de Lucky Luke !
Néanmoins, le (dés)honneur est sauf : au classement général des relais (y compris équipes mixtes et féminines donc), les Dalton ont la satisfaction de terminer devant le relais de la Gendarmerie Nationale et le regret d'arriver après le relais des Avocats.
Je jurerais avoir entendu un gendarme grommeler "C'est comme dans la vraie vie, on voit bien à qui profite le crime et le système judiciaire". Les avocats ont annoncé préparer une action en diffamation pour obtenir réparation du préjudice moral subi à cause de cette remarque.
Au titre des leçons à tirer pour les coureurs ou apprentis coureurs :
- si tu ne t'entraînes pas, ne t'inscris pas à un marathon, même en relais ;
- si tu cours pendant 24 heures, ne t'inscris pas à un marathon une semaine plus tard, même en relais ;
- si tu dois absolument courir avec trois boulets, choisis une tenue discrète pour avoir une chance de passer inaperçu ;
- si tu dois participer à une course dans le Sud de la France, assure toi que ce n'est pas entre juin et août.
Bref, les seules à mériter des médailles au titre de ce week-end sont nos femmes, Ma Dalton compris, qui ont assuré, pêle mêle, parfois ensemble, parfois seules, réception des quatre Dalton, préparatifs d'un déménagement qui a lieu lundi, réception de deux à quatre enfants en plus de d'habitude au titres des activités de chorale et de soutien logistique familial.
Mercià toutes et tous pour ce week-end running qui restera dans les annales familiales ... au moins pour le numéro du dossard.
A suivre ...